AMANDINE, LE PREMIER BEBE-EPROUVETTE, SOUFFLE SES 30 BOUGIES

Amandine (1er bébé eprouvette français) aujourd'huiLe 24 février 1982, naissait Amandine, le premier bébé-éprouvette français, moins de quatre ans après l'anglaise Louise Brown (premier bébé au monde né de la fécondation in vitro (FIV)). Que de progrès en trois décennies ! Cette technique d’assistance médicale à la procréation (AMP) a permis la naissance de plus de 4 millions d'enfants dans le monde. En France, chaque année 20.000 bébés voient le jour grâce à la FIV.

Un moment propice aux souvenirs

René Frydman, ancien chef du service de gynécologie-obstétrique de l'hôpital Antoine Béclère à Clamart (Hauts-de-Seine), à l'origine d'une série de "premières" en France, se souvient de ce moment de "bonheur" et du chemin qui a conduit à sa conception.Une aventure qu'il a menée avec le biologiste Jacques Testart venu rejoindre l'équipe de Clamart.Quand "vous voyiez les premiers embryons au microscope, c'était formidable. A chaque étape, il y avait quelque chose qui vous tenait en haleine, chaque étape était une victoire", dit-il. C'était artisanal à l'époque. "Il nous a fallu deux ans pour voir l'ovocyte, et quatre pour réussir". "La naissance d'Amandine s'est faite en cycle naturel sans traitement de stimulation hormonale de la mère, comme on continue à la faire parfois", poursuit-il."A l'heure actuelle, si on devait refaire Amandine, on ne pourrait pas à cause du carcan administratif", s'exclame Violaine Kerbrat, sage-femme, une des quatre personnes présentes à l'accouchement d'Annie, la mère d'Amandine.Face à la frénésie médiatique - photographes sur les toits, intrusion de journalistes "déguisés en personnel hospitalier" -, une stratégie avait été élaborée pour protéger l'anonymat de la mère. "J'avais inscrit sur le tableau : Madame X, césarienne le 28 février, pour brouiller les pistes", se rappelle le Pr Frydman. "La mère était censée être ma cousine. Donc, quoi de plus normal que la chef sage-femme et le Pr Frydman passent la voir" en salle des naissances, raconte Mme Kerbrat. "Je ne pouvais pas faire venir Testart à l'accouchement, sinon tout le monde aurait su", indique Frydman.La naissance, finalement sans césarienne, s'est passée dans la "douceur"; "il y avait un aspect magique", reconnaît Mme Kerbrat."On a rusé pour la sortie incognito d'Amandine et sa maman. Je portais le bébé, et, avec sa mère en robe de chambre, nous avons rejoint l'ambulance par des couloirs du sous-sol, sans que personne s'en aperçoive", se rappelle-t-elle.A 68 ans, le Pr Frydman ne décroche pas. "Je vais continuer - faire de la recherche", lance ce médecin engagé dans la cause des femmes, qui déplore le retard français en matière de médecine de la reproduction et le positionnement de la France sur la recherche sur l'embryon, interdite sauf dans certains cas par dérogation. Il dénonce le "maquis de précautions sur le plan législatif qui contribue au retard français". Pour lui, il ne s'agit pas de faire n'importe quoi, mais il reste tant de choses à explorer, pour savoir par exemple pourquoi un embryon humain se développe normalement ou pas. D'où un projet de Fondation : René Frydman va lancer un blog pour la création d'une fondation - en principe en septembre prochain - visant à informer et à promouvoir la recherche sur la prévention et la lutte contre la stérilité. On doit à son équipe les premières naissances après congélation d'embryon en 1986, après diagnostic préimplantatoire (DPI) en 2000, après maturation in vitro en 2003, après congélation d'ovules en 2010. Le Pr Frydman regrettait alors d'avoir dû recourir à une technique moins performante que la congélation ultra rapide (la vitrification) utilisée à l'étranger "au prétexte que toute innovation est assimilée à de la recherche sur l'embryon".Enfin en janvier 2011, naissait à Clamart pour la première fois en France un "bébé du double espoir", dont le sang du cordon ombilical a permis de faire une greffe de moelle à sa sœur malade.Amandine, elle, est tout ce qu'il y a de plus normal : "j'ai les mêmes défauts, qualités, questionnements que chacun. tout va bien. Ca a forcément influencé mes parents, ça leur a rendu service, mais moi ca n'aura aucunement influencé ma vie", a-t-elle confié à France2.Source : Brigitte Castelnau (AFP)

Prouesse technique et médicale

Selon le dossier publié pour l'occasion par l'agence de la biomédecine, un couple sur sept consulte un médecin aujourd'hui, parce qu'il rencontre des difficultés pour concevoir un enfant. Et environ un couple sur dix est traité pour des problèmes d'infertilité. D'autres chiffres sont plus parlants, même s'ils remontent à 2009 (ce sont les plus récents) : cette année-là, 21 759 enfants sont nés après une AMP, soit 2,6 % des naissances. 94 % des tentatives se sont faites en intraconjugal, c'est-à-dire avec les gamètes du couple. Il y a eu près de 74 500 tentatives de fécondation in vitro, et l'AMP avec tiers donneur a représenté 6 % des fécondations in vitro. 190 enfants sont nés grâce à un don d'ovocytes et 1 110 grâce à un don de spermatozoïdes. Si l'AMP a longtemps été considérée comme une prouesse technique et médicale, elle est devenue aujourd'hui un ensemble de possibilités bien codifiées et efficaces permettant à de nombreux couples de devenir parents, que l'infertilité vienne des hommes ou des femmes. Mais le chemin est souvent long, difficile, et le succès n'est malheureusement jamais garanti. "Aujourd'hui, l'AMP n'est pas qu'une affaire d'éprouvette, mais une prise en charge adaptée par une équipe pluridisciplinaire compétente. Chaque couple a son propre parcours et les techniques qui lui sont proposées sont spécifiquement adaptées à sa situation", précise le dossier de l'Agence de la biomédecine. Il faut rappeler que la France est l'un des rares pays où les tentatives d'AMP sont prises en charge par l'Assurance maladie, à hauteur de quatre tentatives pour chaque enfant désiré, jusqu'aux 42 ans révolus de la femme.Source : lepoint.fr

Pourtant les dons de gamètes restent rares…

Mais, si de nombreux progrès ont été réalisés en 30 ans, les donneurs de sperme et surtout d'ovule manquent en France, allongeant le temps d’attente des futurs parents.

Les 30 ans d’Amandine est l’occasion de rappeler la nécessité de recueillir des dons de gamètes, et notamment d’ovocytes. Aujourd’hui, « Un couple sur sept consulte un médecin parce qu’il rencontre des difficultés pour concevoir un bébé », insiste les membres du CECOS (Centre d’Etude et de Conservation des Œufs et du Sperme humaine).Pour en savoir plus sur les dons d’ovule ou de sperme, consultez notre article du 8 novembre 2011 : « Don de gamètes : « Donner le bonheur d’être parents » ».