ETUDIANTS : MANGER OU SE SOIGNER, IL FAUT CHOISIR

Etudiants : manger ou se soigner, il faut choisirAlors que François Hollande, Président de la République, fait de la jeunesse une priorité de son quinquennat, la Mutualité Française et la Mutuelle des étudiants (LMDE), ont présenté la semaine dernière les résultats de « Santé et conditions de vie des étudiants »*, un nouvel ouvrage qui dresse un panorama de l’état de santé et de la situation économique et sociale des 18-25 ans en France. Il révèle que les étudiants ont de plus en plus de mal à vivre décemment.

34% des étudiants déclarent avoir renoncé à des soins médicaux au cours des 12 derniers mois

Le rapport s'appuie sur les résultats de la 3e enquête nationale réalisée par l'Observatoire Expertise et Prévention pour la Santé des Étudiants (EPSE) de La Mutuelle des étudiants (LMDE). Sans être alarmistes sur l’état de santé des jeunes, la Mutualité Française et la Mutuelle des Étudiants se disent fortement préoccupées par ces résultats et y voient les prémices de difficultés futures.En effet, si la majorité des étudiants interrogés (82%) s’estime en bonne santé, un étudiant sur cinq juge que son état de santé s’est dégradé par rapport à l’année précédente. Un tiers des étudiants (34%) déclare même avoir renoncé à des soins médicaux au cours des 12 derniers mois. La première raison invoquée est un manque de temps (46 %). Ensuite viennent l’automédication (41 %) et les raisons financières (29 %). Plus grave, cette proportion s’accentue pour les étudiants qui jugent leur état de santé mauvais ou moyen (respectivement 53% et 54%). Autre constat plutôt alarmant, un étudiant sur cinq n’a pas de médecin traitant.A cela s’ajoute que 19% des étudiants ne sont pas couverts par une complémentaire santé, au regard des 6% de Français qui ne sont pas protégés. Or, les résultats de l’enquête montrent aussi que la complémentaire santé améliore l’état de santé des étudiants en facilitant l’accès aux soins, notamment pour consulter un dentiste, un ophtalmologue, un gynécologue ou des spécialistes.Globalement, il ressort de cette enquête que les étudiants ont une mauvaise perception de notre système de santé. Ils portent, en effet, un jugement négatif sur l’égal accès aux soins en France et semblent perdre confiance dans notre système de protection sociale. Ainsi, la moitié des étudiants ne sont pas d’accord avec l’affirmation : « En France, chaque personne a la possibilité d’être soigné quelles que soient ses ressources financières. »

S’improviser médecin

Pour se soigner, certains pratiquent l’automédication. Selon l’enquête de la LMDE, au cours des douze derniers mois, 92 % des étudiants se sont improvisés médecin. Pour cela, ils achètent des médicaments en vente libre en pharmacie ou ils en utilisent d’anciens prescrits. Cette situation de précarité a aussi des conséquences sur le moral. 38 % d’entre eux avouent avoir ressenti au cours de l’année, un sentiment constant de tristesse et de déprime.

Un job pour arrondir les fins de mois

Les difficultés financières constituent la principale cause de renoncement aux soins. Près d'un étudiant sur quatre déclare avoir de réelles difficultés à joindre les deux bouts à la fin du mois en raison de dépenses structurelles de logement, d'électricité et d'alimentation. L'enquête révèle d'ailleurs que plus de la moitié des étudiants vivent avec moins de 400 euros par mois, autrement dit sous le seuil de pauvreté de 954 euros par mois.Ne pouvant sans sortir seuls ou seulement avec l'aide de leurs parents, nombreux sont aujourd'hui les étudiants contraints de prendre un job pour faire face à leurs dépenses. En France, l'étude rapporte que c'est 28% des étudiants qui sont ainsi touchés par cette nécessité qui aura forcément un certain impact sur leurs études.

« Les mutuelles devraient plutôt rembourser les soins que payer des taxes ! », Etienne Caniard

Pour Etienne Caniard, nouveau président de la Fédération nationale de la Mutualité Française, les jeunes ont des raisons objectives d’être inquiets. Le diagnostic est de plus en plus fréquemment avancé : la génération des « baby-boomers » a vécu « à crédit ». Si rien n’est fait, les jeunes devront régler pour leurs aînés des charges considérables liés à la santé, sans, peut-être, avoir droit eux-mêmes aux garanties dont bénéficiaient leurs parents. Il faut donc redonner tout son sens au pacte solidaire propre à notre système de protection sociale, et lui permettre d’intégrer des situations nouvelles, notamment la précarisation des jeunes, qui à la sortie de leurs études connaissent une assez longue période d’instabilité professionnelle.

« A la LMDE, notre objectif est d’aider les étudiants dont la situation sociale et sanitaire se dégrade », Gabriel Szeftel

Pour Gabriel Szeftel, président de a LMDE depuis décembre 2009, les étudiants subissent de plein fouet les reculs de l’assurance maladie obligatoire, car ils « consomment » principalement les soins de premier recours. Franchises médicales, participations forfaitaires, baisse de remboursement des médicaments… : pour 80% de la population, c’est désormais moins d’un euro sur deux qui est pris en charge par la Sécurité sociale. Dans ces conditions, le bénéfice d’une complémentaire santé est devenu indispensable. Or, les dispositifs de Couverture maladie universelle complémentaire et d‘Aide à la complémentaire santé ne sont pas adaptés aux étudiants. Face à un système de protection social inapproprié, il ne faut pas s’étonner de la perte de confiance des jeunes.La LMDE formule des propositions pour améliorer la situation. La principale d'entre elles : la création d'un chèque santé national pour faciliter l'accès à une complémentaire santé. Autres recommandations : donner la possibilité aux étudiants d'être couverts à moindres frais, élargir l'accès à l'aide à la complémentaire santé (ACS) aux étudiants qui vivent encore chez leurs parents et qui ne sont pas fiscalement indépendants.Source : 24h santé*« Santé et conditions de vie des étudiants » est un ouvrage écrit par la LMDE et coédité par la Mutualité Française et Rue des écoles. Pour la réalisation de cette enquête, en collaboration avec l’Institut français d’opinion publique (IFOP), près de 8 500 étudiants, représentant l’ensemble des académies, ont répondu à 134 questions autour de 4 thèmes : la situation économique des étudiants, l’état sanitaire et social, l’accès aux soins et le regard des étudiants sur la société.